Après le confinement, ma soif de sécurité s'est transformée en désir d'aventures, grâce à ma moto - BLOG

VOYAGE - Vous vous souvenez du début de la guerre? Celle de mars 2020. Cette guerre épidémiologique qui en l’espace d’un battement de cil m’a privé d’au moins quatre des quatorze besoins fondamentaux de Virginia Henderson: me mouvoir, m’occuper en vue de me réaliser, et me divertir. En tant que motard j’aurais tendance à rajouter le besoin n°9,” éviter les dangers”.

La genèse

Cette première période de confinement (17 mars au 11 mai 2020) fut particulièrement frustrante pour moi, car j’étais inscrit à la moto-école. Je me rappelle de ce moment où je pestais, ne comprenant pas en quoi l’apprentissage de la moto, en portant un casque et des gants personnels, en étant à plusieurs mètres du moniteur, qui lui-même porterait un masque chirurgical, constituait une activité à haut risque de contamination nécessitant la fermeture de la moto-école.

Ce chamboulement chronologique me faisait trépigner, car je voyais les beaux jours approcher et je ne pouvais pas m’empêcher de m’imaginer sillonner les routes vallonnées de ma région du Calvados. Encore fallait-il réussir le plateau puis la conduite.

Puis ce jour est arrivé, le 12 août 2020, j’ai le pass pour la liberté, ce fameux pass qui me permet de pouvoir enfin conduire ma moto! Car, comme pris de masochisme, j’avais acheté ma moto deux mois avant l’obtention de mon permis.

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Durant le mois de novembre 2020, alors que j’ai à nouveau vu une partie de mes “14 besoins fondamentaux” dramatiquement diminués, un besoin d’évasion urgent se fait ressentir. Partir loin de chez moi, voir des paysages vus que dans des reportages, découvrir d’autres façons de faire et rencontrer des gens d’ailleurs, tout ça à moto.

Aussi flippant puisse-t-il être, le projet Roadtrip prend vie et je me retrouve à tracer un itinéraire d’environ trois mille kilomètres dans le sud-est de la France.

On va où?

Le lac d’Annecy, le Vercors avec ces routes dessinées à main levée dans les parois de vertigineux massifs rocheux, le lac de Serre-Ponçon d’un bleu hypnotique reflétant de majestueux sommets, le col de Turini, les gorges du Verdon; tant d’endroits qui ont titillé ma curiosité! Je ne pouvais plus me contenter de les voir depuis mon canapé, à travers le regard de reporteur ou de journaliste-essayeur, il fallait que je vive!

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Le départ

“Rendez-vous à 4 h 30 à la station Intermarché de Croissy-Beaubourg (Seine-et-Marne) pour un départ à 5 h”.

Le 20 juin 2021, 4 h 45, une Ninja ZX10R, une Z900 et une Fazer 600 s’abreuvent au puits de pétrole pendant que leurs cavaliers configurent leurs intercoms. D’un coup une voix sortie de nulle part retentit dans nos casques: “Oh les gars! Je vous entends! C’EST INCROYABLE!” Il s’agissait d’un quatrième aventurier qui arrivait avec sa 752 S. Son intercom s’était connecté automatiquement aux nôtres alors qu’il roulait à environ 500 mètres de nous!

5 h 30, nous voilà partis pour environ 570 kilomètres direction Annecy. Une excitation mêlée à une appréhension de l’inconnu nous faisait rire bêtement dans nos casques.

Après le confinement, ma soif de sécurité s'est transformée en désir d'aventures, grâce à ma moto - BLOG

Nous quittons l’Île-de-France; le soleil se lève nous faisant dont d’une lumière réconfortante; les guitares de “Sweet Home Alabama” dans mon casque s’harmonisent avec la voix vrombissante de ma Fazer, et je rigole intérieurement en me disant ”ça doit être ça la liberté!”. J’avais imaginé cet instant tellement de fois dans ma tête, mais cette fois c’était bien réel: “on y est les gars!!”.

Une fois arrivé au premier check-point, une station-service quelque part entre l’Yonne et l’Aube, notre cinquième complice nous rejoint en Diversion 600. Maintenant que toute la bande est au complet, le convoi de 426 chevaux sillonne les routes; rien ne pouvait nous arrêter! Enfin non… rien mis à part les crampes aux mollets. Mais bien entendu nous n’allions pas déclarer forfait aussi rapidement! D’autant plus que vers 17 h 45, à la sortie d’un virage, un changement de décor radical, tel un maestro, accorde nos voix pour ne former qu’un seul et harmonieux “wouaaaahh” d’émerveillement! Bienvenue en Haute-Savoie.

Je n’étais pas prêt pour ça

Elles m’avaient pourtant montré des photos d’elles; j’avais su deviner la sensualité de leurs courbes; elles m’avaient laissé entrevoir l’étroitesse de leurs profondeurs; mais une fois arrivé sur elles: l’orgasme oculaire était inévitable!

Les routes du Vercors, plus précisément celles du Cirque de Combe Laval, n’avaient eu aucune pitié pour mes yeux et m’ont fait VIVRE un spectacle qu’aucune Madame Loyal ne saurait égaler.

Plus le bitume défilait sous nos bottes et plus nous avions l’impression d’avoir changé de pays.

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Grimper encore et encore jusqu’à atteindre des cimes blanchâtres, “bordel les gars il y a de la neige!”.

Enchaîner des lacets à ne plus en finir sous une pluie torrentielle; esquiver le danger pour se sentir tellement petit face à l’immensité du lac de Serre-Ponçon;

Me retrouver à un peu plus de 1000 kilomètres de chez moi, entrain de nager dans la mer méditerranéenne qui caresse les abords de Nice et réaliser que je suis loin;

Repartir avec mon short de bain mouillé, sanglé par-dessus mon paquetage en guise de bannière arborant implicitement à tous ceux que je croisais qu’à ce moment précis, j’étais plus vivant que jamais!

Être ébloui par le bleu turquoise du lac de Castillon;

Il le fallait, c’était nécessaire, un besoin fondamental pour me réaliser en tant que motard, en tant qu’ami, en tant que frère, en tant qu’humain.

À la rencontre de l’humanité

”[…], mais il est essentiel, si l’on veut devenir un véritable être humain et donner un sens à son existence, d’avoir un cœur bon.” -Dalaï-Lama.

Le 21 juin 2021 vers 19 h, cette citation s’est illustrée à nous d’une manière si authentique que nous en étions presque étourdis.

Nous arrivons à Chorges dans les Hautes-Alpes, chez Roselyne et son mari chez qui nous passerons la nuit. Exaspérant incident, la Benelli 752 S se retrouve au sol juste devant l’entrée de la maison. Le pilote n’est bien heureusement pas blessé, mais le levier d’embrayage est brisé. Impossible de poursuivre le Roadtrip dans cette condition.

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Mais pas de panique, le mari de Roselyne fonce dans son garage et dans la minute, nous voilà, dans un ébahissement général, éblouis par un jet d’étincelles: il découpait un bout d’un grand tuyau métallique à la disqueuse! Cette scène restera à jamais gravée dans ma mémoire.

Il tente d’imbriquer la prothèse au moignon du levier d’embrayage, mais la manœuvre est infructueuse. Notre hôte ne se décourage pas et ce n’est finalement qu’un simple tube en PVC qui nous permettra d’aller à la première heure jusqu’au Dafy Moto de Gap, situé à 15 minutes de là.

À peine après nous avoir sortis de cette galère, notre bricoleur prononce les mots magiques: “Apéro? Bière, whisky, pastis, rhum? Qui boit quoi?” Et là, alors que toute la pression de la journée redescend, j’ai envie de pleurer! J’avais envie de prendre ce Monsieur dans mes bras et lui faire un gros câlin, mais un peu de tenue voyons, je me suis contenté d’un reconnaissant “je prendrais bien une bière fraîche merci”.

Vers 21 h 30 environ, nous voilà en train d’arpenter les rues de Chorges (Hautes-Alpes) à la recherche du dîner de ce soir. Nous avions complètement oublié, mais c’était la fête de la musique, d’où la bonne ambiance dans un des bars de la rue.

Ça faisait tellement de bien de voir des humains danser, rigoler, voir des sourires sur des visages “dénudés”, ainsi qu’un guitariste sur une scène; tant de choses d’habitude banales, mais ternies par la guerre, le spectacle était ahurissant.

Et il n’allait pas tarder à devenir exceptionnel, car pendant que je demande à la responsable de l’endroit si elle sert encore des plats, j’entends le guitariste annoncer: “je voudrais vous présenter Dany qui est de passage dans la ville et qui va m’accompagner sur scène”. Je tourne la tête et sous un tonnerre d’applaudissements, je vois mon frère, pianiste, en train d’enflammer la piste grâce à une salsa endiablée.

C’est aussi pour vivre ces moments inattendus, insolites, que je suis parti de chez moi! J’en avais besoin, besoins fondamentaux de me divertir, mais surtout de m’occuper en vue de me réaliser.

Et je me suis recréé

Avant de partir, j’avais soif de richesse, de confort, de sécurité. Intéressé par l’investissement immobilier, j’avais prévu de créer ma première SCI et d’acheter un ensemble de pierres. Mais l’arrivée de la guerre en a décidé autrement, remettant en question mes objectifs pour l’année 2021.

Je suis parti!

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Et je suis revenu avec une soif d’aventures, de paysages époustouflants, d’adrénaline me poussant à ouvrir la poignée des gaz pour que le soir, allongé sur mon lit, je puisse rembobiner la bande et visualiser dans ma tête tous ces instants qui auront fait de moi quelqu’un de vivant.

À l’heure où un pass (sanitaire) est nécessaire pour survivre, si tu lis ces lignes, prends le temps de t’offrir un pass (permis moto) pour vivre!

Pour ma part, j’organise déjà ma prochaine thérapie: le Mont-Blanc j’arrive!!

Mais toi, où vas-tu partir pour te recréer?

Vous pouvez retrouver Samuel sur son compte Instagram.

À voir également sur Le HuffPost: Chaque semaine, ce rescapé de la route offre des cadeaux aux passants

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Samuel B.

Infirmier

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