Vaccins COVID : comment bien protéger les personnes immunodéprimées ?

Le 6 janvier, lorsque Margaret Collins, une géologue de 43 ans originaire du Texas, a reçu sa première dose du vaccin Moderna, elle est rentrée chez elle et a fondu en larmes.

« Je venais enfin de recevoir ma dose. J’ai vu ça comme un retour à la vie que j’aimais. »

Margaret se considère comme extravertie. Elle a dû se faire ermite pendant la pandémie. Elle et son mari sont rarement sortis et jamais sans leurs masques. Sa prudence est justifiée car elle souffre d’une maladie auto-immune généralisée qui comprend une hépatite, une arthrite psoriasique, un vitiligo et du diabète de type 1. Elle est également particulièrement vulnérable face à la COVID-19 car elle a reçu une greffe de pancréas et de rein en 2014. Elle prend donc trois traitements pour inhiber son système immunitaire afin que son organisme ne rejette pas ces organes. Or les vaccins fonctionnent en exploitant les fonctions d’un système immunitaire compétent.

Depuis la mise sur le marché du premier vaccin contre la COVID-19, les personnes immunodéprimées vivent dans l’incertitude. Elles attendent de savoir si la vaccination leur offre une protection, et si oui, à quel point. Les essais cliniques des vaccins n’ont inclu que très peu de sujets immunodéprimés. Le fait de les inclure aurait pu interférer avec les résultats sur leur efficacité pour la population générale. Ainsi, ce groupe n'a pu disposer que de très peu de données sur les effets de la vaccination en prenant en compte leur état de santé. Aujourd’hui, des études arrivent au compte-goutte.

« Nous commençons à comprendre certaines choses que nous ne savions pas, alors qu’auparavant, nous n’étions pas au courant de ce que nous ne savions pas », assure Peter Martin, hématologue et oncologue à la Weill Cornell Medicine à New York.

Il est difficile d’estimer le nombre de personnes immunodéprimées en France et dans le monde. Rien qu’aux États-Unis, une étude a déterminé qu’environ 9 millions d’Américains ayant souscrit une assurance privée ont recourt à des traitements immunosuppresseurs.Toutefois, ce nombre n’inclut pas les patients immunodéprimés qui ne sont pas sous traitement ou qui n’ont pas d’assurance complémentaire privée.

Depuis les prémices de la pandémie, Margaret s’inquiète de la réaction que pourrait avoir son organisme face au vaccin. Et lorsqu’elle a lu qu’une étude avait révélé que les taux d’anticorps chez les receveurs d’organes étaient faibles après la première dose du vaccin à ARN messager, elle a paniqué.

Vaccins COVID : comment bien protéger les personnes immunodéprimées ?

Même si elle a été vaccinée et qu’elle a toujours porté un masque, elle s’est demandé si elle était réellement protégée. « Ça m’a vraiment apeurée. »

Une étude de suivi a démontré que la moitié des receveurs d’organes réagissaient bien au vaccin. Mais cela n'a pas pour autant rassuré Margaret. « Grossièrement, c’est un peu un jeu de hasard », déclare-t-elle.

Une étude publiée le 14 juin apporte une lueur d’espoir. Après deux doses d’un vaccin à ARN messager, trente receveurs de greffe disposant de peu ou pas d’anticorps ont reçu une troisième dose. Il ne s’agissait pas toujours du même vaccin que pour les deux premières. Pour les six personnes dont les taux d’anticorps étaient faibles, leurs niveaux ont augmenté. Un quart des autres sujets, dont l’organisme n’avait jamais répondu au vaccin, a développé des taux d’anticorps assez élevés pour protéger de la COVID-19 après une troisième dose.

En France, le ministère des Solidarités et de la Santé recommande l’injection d’une troisième dose pour les personnes sévèrement immunodéprimées.

L'étude en question présente des limites considérables. Elle ne porte que sur très peu de sujets et sur différentes combinaisons de vaccins.

UN GROUPE TRÈS DIVERSIFIÉ

Les personnes immunodéprimées sont généralement classées en deux catégories. La première regroupe celles qui souffrent d’une condition médicale sous-jacente qui affaiblit leur système immunitaire, par exemple, les personnes qui souffrent d’une leucémie, d’un VIH non contrôlé ou d’une maladie génétique rare. La deuxième rassemble toutes celles qui nécessitent la prise de traitements immunosuppresseurs, notamment après une greffe d’organe, à cause de maladies rhumatismales ou de certains cancers. Certaines situations s’inscrivent dans les deux catégories, par exemple la leucémie lymphoïde chronique ou le lupus.

Parmi les facteurs susceptibles d’altérer la réponse d’un patient à un vaccin se trouvent les médicaments qui lui sont administrés ainsi que leurs conséquences, la durée du traitement, la maladie dont il souffre et ses antécédents d’infection. Pour les receveurs d’organe, le temps écoulé depuis la greffe rentre également en compte.

« C’est la raison pour laquelle c’est très important pour les personnes souffrant d’immunodépression de parler à un expert de leur situation spécifique puisque l’échelle de variabilité est très large », conseille Aaron Richterman, spécialiste des maladies infectieuses à l’école de médecine Perelman à l’université de Pennsylvanie.

DES INDICES PEU CLAIRS

Les réponses variables aux vaccins contre la COVID-19 s’expliquent par le vaste éventail d’affections et de médicaments qui affaiblissent le système immunitaire. À l’heure actuelle, les éléments dont les scientifiques disposent indiquent que les plus faibles réponses ont été enregistrées chez les receveurs d’organes, chez certains patients atteints de leucémie et chez les personnes sous certains traitements spécifiques. Parmi les médicaments qui réduisent la réponse immunitaire, on trouve le mycophénolate, qui prévient le rejet d’organe, le rituximab, un anticorps utilisé dans le traitement des cancers du sang et de certaines maladies auto-immunes comme la polyarthrite rhumatoïde, et enfin le méthotrexate, conçu pour traiter certains cancers et maladies auto-immunes.

Par exemple, une étude a prouvé que seuls 54 % de 658 receveurs d’organes ont développé des anticorps après l’injection de deux doses de vaccin à ARN messager. Ce taux était encore plus bas chez les patients sous traitement avec du mycophénolate par exemple. Une étude similaire menée sur 609 personnes ayant bénéficié d’une greffe de rein a révélé que seule la moitié d’entre elles disposaient d’anticorps détectables après une vaccination à ARN messager contre tout juste 5 % pour celles qui prenaient du bélatacept. Les receveurs de greffe ont produit encore moins d’anticorps après l’injection d’une unique dose du vaccin Johnson & Johnson.

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