Il y a 20 ans, malade de Parkinson, Michael J. Fox stoppait sa carrière

«J’ai l’air d’un gamin, mais j’ai une maladie de vieux», disait-il. Sous ses airs d'éternel jeune homme, Michael J. Fox a longtemps caché un combat intime contre le temps. Dix années durant, l’acteur a lutté en secret contre la maladie de Parkinson. Au printemps 2000, la star de «Retour vers le futur» doit se rendre à l’évidence, il ne parvient plus à contrôler ses tremblements. En mai, il tourne un dernier épisode de son excellente sitcom «Spin City», qui lui a donné trois Golden Globes et un Emmy. À 38 ans seulement, il lui faut mettre un terme à sa carrière.

Ce qui ne veut pas dire que Michael J. Fox a jeté l’éponge. Le combat a continué sur un autre ring, celui de la sensibilisation à la maladie et du financement de la recherche médicale. Un ring sur lequel l’acteur a retrouvé le grand Mohamed Ali, lui aussi malade. Mais la plus grande alliée de Michael J. Fox restera son épouse, Tracy Pollan, constamment à ses côtés pour le soutenir.

Michael J. Fox se permet encore quelques apparitions sur grand et petit écran, comme dans la série «Curb Your Enthusiasm», où il se jouait de sa maladie. L’humour, la meilleure des armes.

Voici le reportage consacré à Michael J.Fox, initialement publié dans Paris Match en 2000…

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Paris Match n°2663, 8 juin 2000

Michael J.Fox, l’homme-enfant vaincu par le mal du grand âge

de notre correspondant aux Etats-Unis, Romain Clergeat

Il a tourné son dernier épisode de la série télévisée «Spin City». Michael J. Fox ne parvient plus à contrôler ses tremblements. «J’ai l’air d’un gamin, dit-il, mais j’ai une maladie de vieux.» L’éternel jeune homme a débuté à 15 ans à la télévision canadienne et fait la conquête de Hollywood à 21 ans avec la trilogie «Retour vers le futur». Les films et les séries télévisées s’enchaînent lorsque, en 1991, apparaissent les premiers symptômes : des spasmes du petit doigt de la main gauche. Encouragé par sa femme, Tracy, il a poursuivi sa vie d’acteur aussi longtemps que la maladie de Parkinson le lui a permis. A 38 ans, marié et père de trois enfants, Michael se consacre désormais avec courage à la lutte contre ce mal encore incurable. Il a créé une fondation pour financer la recherche médicale. La voie de l’espoir.

La limousine virait sur Sunset Boulevard quand Michael J. Fox a compris que cela recommençait. Dehors, les journalistes et les photographes s’étaient agglutinés pour accueillir la star du sitcom d’A.b.c., «Spin City», mais Fox n’était pas en état de les rencontrer. Avec Tracy, sa femme, il venait à peine d’arriver devant le Beverly Hilton, où avait lieu la cérémonie des Golden Globe Awards, qu’une nouvelle crise se déclenchait : sa jambe et son bras gauches étaient parcourus de spasmes incontrôlables. Derrière les vitres fumées de la voiture, Tracy tenait la main de son mari et commençait à lui masser le pied. Progressivement, les soubresauts se sont apaisés. Mais tous deux savaient que ce n’était qu’un répit passager. Il fallait attendre que les médicaments agissent. Fox a demandé au chauffeur de faire une première fois le tour du pâté de maisons. Puis une deuxième, et une troisième. La crise était passée. En s’extirpant de la limousine, le héros de «Retour vers le futur» pouvait de nouveau afficher son physique juvénile de petit prince de Hollywood. Momentanément...

A 38 ans, la star de «Spin City» est atteinte de la maladie de Parkinson et ne peut désormais plus cacher la nature de son mal. Ce soir-là, en montant recevoir le Prix du meilleur interprète télé de l’année, Michael J. Fox a annoncé que cette saison serait sa dernière. «En commençant la série, j’avais mis dans la confidence les producteurs. Je ne pouvais pas leur garantir quel serait mon état dans trois ans. Ils m’ont fait confiance et je m’étais promis d’assurer cent épisodes. Je suis têtu et j’ai voulu tenir parole. J’arrête non pas parce que je ne peux plus, mais parce que cette maladie m’a obligé à réviser mes priorités. Je souhaite désormais me consacrer à ma famille.» Pour ses adieux à l’écran, les scénaristes de la série lui avaient écrit un final sur mesure dans lequel son personnage de conseiller du maire de New York abandonne ses fonctions et remercie tous ses collaborateurs par un : «Ça va aller. Ne vous inquiétez pas.» Sur le plateau mais aussi dans les chaumières américaines, on a beaucoup pleuré. Ce dernier épisode a d’ailleurs recueilli son plus fort taux d’écoute en trois ans, avec 33 millions de téléspectateurs.

Il y a 20 ans, malade de Parkinson, Michael J. Fox stoppait sa carrière

Michael J. Fox n’est pas la seule personnalité du pays à être frappée par la maladie de Parkinson ; Muhammad Ali, le pasteur Graham ou encore l’actuel attorney général, Janet Reno, en sont aussi victimes, comme 1 million d’Américains moins connus. Mais si son cas a particulièrement ému l’Amérique, c’est sans doute parce que ce chérubin de la comédie avait conservé un visage d’adolescent qui semblait lui conférer une immunité face à une maladie statistiquement réservée aux plus de 60 ans. (Seuls 10 % des patients frappés par cette maladie ont moins de 40 ans.) D’après son neurologue, il est arrivé au terme du premier cycle de la maladie (celle-ci est divisée en trois phases : faible, moyenne et grave). Grâce aux médicaments qu’il prend quotidiennement, il peut, selon son médecin, espérer mener une existence à peu près normale pendant dix ans. Si, en revanche, le mal devait s’accélérer, il serait alors condamné à recevoir des soins 24 heures sur 24, cloué sur un lit, privé de toute autonomie. «Je ne vois pas cela comme une tragédie, affirme pourtant Fox. C’est simplement ma réalité. Parfois, je vois certaines personnes plus gravement atteintes et j’éprouve évidemment de la compassion, mais je ne m’identifie pas à elles. Je n’en suis pas encore là.»

Depuis la découverte de sa maladie, en 1991, il refuse de s’apitoyer sur son sort et croit dur comme fer que tout finira par s’arranger. Pourtant, ces neuf années passées à cacher son Parkinson ont été moins faciles qu’il veut bien l’affirmer. Chacune de ses apparitions publiques devenait pour lui source d’angoisse, car il ignorait si ses médicaments allaient être efficaces suffisamment longtemps. La semaine dernière, en pleine interview avec Diane Sawyer de la chaîne A.b.c., il a dû s’interrompre une quinzaine de minutes pour prendre ses pilules et attendre leur effet. Mais le traitement est épuisant. C’est pour cela qu’il y a peu encore il les prenait rarement en privé et préférait supporter ses tremblements. Même si, au plus fort des crises, il devenait incapable de prendre un verre d’eau ou une télécommande. Grâce à ses médicaments, il peut dessiner. Sans, il ne peut tenir un stylo entre ses mains. «Avec le temps, j’ai appris plusieurs trucs pour masquer mes difficultés. Lorsque je sens les tremblements arriver, je prends un objet dans la main pendant une quinzaine de secondes, jusqu’à ce que cela passe. Il m’est également arrivé de donner des interviews en me promenant devant mon interlocuteur qui rapportait dans son article que j’étais très nerveux!»

C’est sur le tournage du film « Doc Hollywood», en 1991, qu’il a découvert les premiers symptômes. Inopinément, il perdait parfois le contrôle de son petit doigt. Un médecin lui assura que ce n’était rien. Mais deux mois plus tard, une raideur inhabituelle avait envahi son bras gauche. Le verdict d’un spécialiste new-yorkais fut succinct mais sans ambages : «Mr Fox, vous avez la maladie de Parkinson.» En sortant de la consultation, il annonça la nouvelle à sa femme, qui fondit en larmes. Tracy Pollan, il l’avait rencontrée sur le plateau de la série qui l’a fait connaître au début des années 80, «Family Ties». C’est elle qui l’a calmé quand la gloire des «Retour vers le futur» lui est un peu montée à la tête. Il sortait beaucoup, buvait pas mal et emboutissait un peu sa Ferrari. Depuis douze ans, ils forment un couple comme Hollywood aime à croire qu’il peut en exister dans le monde du show-business. Loin de la dinguerie californienne, ils habitent dans le Vermont et mènent une vie de famille tranquille avec leurs trois enfants, Sam (11 ans) et leurs jumelles de 5 ans, Aquinnah et Schuyler.

Bien évidemment, après le premier diagnostic, le couple a consulté un deuxième, puis un troisième spécialiste. Tous accueillaient Fox par des mots rassurants : « À votre âge, vu votre condition physique, je doute que cela soit la maladie de Parkinson.» Avant d’arriver à la même douloureuse conclusion. Réaliste mais soucieux de comprendre, Fox tenta de fournir aux médecins plusieurs débuts d’explication sur l’origine du mal. Serait-ce la conséquence des coups de crosse reçus lorsqu’il jouait assidûment au hockey au Canada dont il est originaire? Celle d’un évanouissement qu’il avait eu après une cascade sur le tournage de «Retour vers le futur»? «Au bout d’un certain temps, il m’a bien fallu réaliser que c’était juste le destin. Pourquoi moi? Je n’en sais rien mais c’est comme ça», dit-il.

Très vite, les symptômes se sont faits plus pressants, la maladie progressait ; il ne pouvait bientôt plus contrôler sa main gauche. «Mon fils l’appelait la tremblote. Nous avions établi un jeu. Dès que je commençais à ne plus pouvoir diriger ma main, il la prenait entre les mains et nous comptions jusqu’à 5. J’avais peur qu’il souffre de ma condition, mais récemment il a fait quelque chose qui m’a beaucoup touché. A 11 ans, c’est un petit homme. Alors que nous discutions tous les deux, mes doigts se sont mis à trembler. Il a continué à me regarder dans les yeux tout en posant sa main sur la mienne et m’a parlé comme si de rien était.»

Pourtant, Michael J. Fox n’entendait pas laisser la maladie lui dicter sa vie. Il a signé pour la série «Spin City» en avertissant les producteurs de la nature de son mal. Peu de temps avant de commencer le tournage, il a décidé de subir une thalamotomie, une opération susceptible d’éliminer les crises les plus violentes. Un tremblement de la main gauche, qui «lui permettait de mélanger une margarita en moins de 5 secondes», le handicapait désormais de façon quasi permanente. Le taux de réussite de l’intervention est de 90%, mais un échec pourrait se révéler fatal ou le laisser paralysé à vie. Pour lui, le jeu en valait la chandelle. «Lorsque j’ai quitté le Canada, sans un sou en poche, pour tenter ma chance à Hollywood, c’était un sacré pari, dit-il. Et à la différence de ce que vous allez accomplir, moi, à cette époque, je ne savais pas ce que je faisais.» Anesthésié mais conscient, Fox passa quatre heures sur le billard, réagissant aux directives du praticien. «A un moment, il m’a demandé de bouger mon bras, mais j’en étais incapable. Je m’en voulais parce que j’avais l’impression que c’était ce qu’il attendait. Malgré mes efforts, je n’y arrivais pas. J’étais désespéré. Je pensais que l’opération avait raté. Il m’a alors dit : “Vous ne pouvez pas? Tant mieux, cela veut dire qu’on a fini et que tout s’est bien passé.”»

A mesure que « Spin City » devenait un succès, les difficultés de tournage s’aggravaient. Michael devait prendre ses médicaments toutes les deux heures. Le plan du travail fut modifié, passant du lundi-vendredi au jeudi-mardi pour lui donner un week-end de récupération. On adapta également la mise en scène. Au début de la série, il n’était pas rare de voir son personnage faire du skateboard dans l’Hôtel de Ville. Ce genre de «cascade» n’était bien sûr plus possible. De même, les scènes statiques furent supprimées pour lui permettre d’être toujours en mouvement pour mieux dissimuler ses tremblements.

Chez les Fox, la maladie est devenue un sixième personnage. Sam, l’aîné, est en mesure de comprendre. Les petites jumelles, moins. Elles ne saisissent pas toujours pourquoi papa est d’accord pour leur lire une histoire à condition que cela soit elles qui tiennent le livre entre leurs mains... Parfois, elles pleurent aussi parce que les médicaments altèrent l’élocution et le timbre de voix de leur père qui s’exprime alors sur un ton plus grave et plus autoritaire qu’il ne le voudrait. Sa femme, Tracy, désormais devenue un peu son infirmière, s’occupe des moindres petites choses de la vie, l’aide à se brosser les dents ou à boutonner ses chemises.

Aujourd’hui, Michael J. Fox préfère se consacrer au lobbying devant le Congrès américain pour qu’on augmente le budget de la recherche ou s’occuper de sa fondation plutôt que faire croire que tout va bien. «Je peux encore accomplir tout ce qu’un mari doit faire dans une maison, mais je ne me fais pas d’illusions, ça ne durera pas. J’aimerais pouvoir interrompre le processus vers la conclusion logique, mais, dans un certain sens, je suis reconnaissant. Cette maladie m’a rendu plus fort. Un million de fois plus sage aussi. J’ai réalisé combien j’étais vulnérable. Peu importent les récompenses et le montant de votre compte en banque lorsqu’on doit affronter ce genre de situation. A la fin, on meurt. Tous. Quand on accepte vraiment la réalité, l’important devient alors la qualité de la vie. Aujourd’hui, voilà ce que je suis. Si cela vous pose un problème, je peux comprendre. Alors fermez les yeux. J’ai 38 ans, je suis persuadé qu’avant mes 50 ans on aura trouvé un remède. Cela me laisse douze ans.»

Sur le journal de son site (michaeljfox.org ), à la date du 16 mai, Michael a écrit : «Je ne peux pas rester. Je dois répondre à du courrier pendant que les médicaments font de l’effet. Je suis impatient d’utiliser un de ces programmes à reconnaissance vocale. Vous voyez ce que je veux dire. Mike.»


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