TEMOIGNAGES. Endométriose, trois femmes racontent leurs douleurs et errances médicales face à la maladie

A l’occasion de la journée mondiale de l’endométriose, le 28 mars, gros plan sur cette maladie douloureuse et handicapante qui touche un grand nombre de femmes. Trois femmes témoignent de leurs quotidiens, de leurs combats, de leurs vies, malgré tout.

L’endométriose, c’est l’endomètre, situé dans l’utérus qui, parfois, envahit d’autres parties du corps, saigne et provoque des douleurs insupportables. Angélique, Blandine, Elodie disent toutes leurs souffrances, leur fatigue, l’incompréhension des proches, de la famille voire des médecins et surtout leur long cheminement avant le diagnostic.

En moyenne, il faut 7 années avant que les médecins ne repèrent une endométriose. Pour certaines, l’errance médicale dure plusieurs années : « Avoir mal au ventre pendant ses règles, c’est normal » leur dit-on.

Elodie Delaune constate que sa famille ne s’est pas montrée très attentive, le milieu scolaire non plus : « On me disait que j’avais mal pour ne pas assister aux cours… » explique la jeune femme, responsable dela Bourgogne- Franche-Comté de l’association nationale de patientes Endomind.

Endométriose : certaines patientes ne ressentent aucun symptôme

Rakoto Nirhy-Lanto est gynécologue-obstétricien à l’hôpital de Vesoul en Haute-Saône. Il nous en dit plus sur cette maladie qu’on connaît peu.

Dès ses études, il a participé aux premières expérimentations conduites à l’hôpital de Besançon avec le Professeur Colette et le docteur Agnani, expérimentations à la pointe de la recherche sur l’endométriose en France.

Ses explications sont claires sur la maladie elle-même : « L’endomètre, qui se situe dans l’utérus, va se loger ailleurs : dans le péritoine, les intestins, la vessie ou même encore le nombril. L’endomètre, qui se gorge de sang, le perd au moment des règles. Oui, l’une de mes patientes saigne du nombril. La pression sur les autres organes provoque d’énormes douleurs, augmentées encore au moment des règles » détaille-t-il.

Selon le docteur Nirhy-Lanto, les symptômes sont principalement les douleurs, l’écoulement sanguin et l’infertilité. Certaines patientes ne ressentent aucun symptôme mais sont diagnostiquées lors des examens effectués pour trouver les causes de leur infertilité.

De 10 à 20 % des femmes souffriraient d’endométriose, 30 à 40 % d’entre elles connaîtraient des problèmes de fertilité.

L'endométriose

L’infertilité : une conséquence dans 30 à 40 % des cas

A cause de douleurs dans le bas ventre, elle subit, en urgence, une opération pour enlever un kyste de 10 centimètres sur l’ovaire gauche. Pendant l’intervention, le chirurgien découvre l’endométriose : l’endomètre a envahi plusieurs organes dont l’ovaire, les trompes. « Il en enlève le maximum. A l’IRM, le médecin n’avait rien vu » raconte-t-elle. “Puis, j’apprends que je souffre d’endométriose, sans qu’on me donne beaucoup d’explications, et que j’aurai beaucoup de mal à avoir un bébé. Les médecins me donnent six mois pour tomber enceinte naturellement sinon, ce sera une PMA, Procréation Médicalement Assistée. Six mois de délai : la pression n’aide pas ! ". Elle en sourit aujourd’hui au téléphone, mais cette difficulté à avoir un enfant, est difficile à accepter. Blandine Béroud a bénéficié de trois fécondations médicales qui se sont terminées par trois fausses-couches prématurées. Aujourd’hui, elle n’a que 27 ans et elle garde espoir.

TEMOIGNAGES. Endométriose, trois femmes racontent leurs douleurs et errances médicales face à la maladie

Elle a essayé d’avoir un bébé, sans succès jusqu’à maintenant : une interruption pour malformation du fœtus et deux fausses-couches. C’était en 2015.

Depuis, elle a changé de travail, trop stressant et incompatible avec l’endométriose, et aussi de compagnon. Le précédent avait du mal à accepter les inconvénients de cette maladie.

Elle a subi plusieurs interventions chirurgicales mais ne se plaint pas : « Je n’ai pas trop mal. C’est supportable, la plupart du temps. J’ai des crises de douleurs, oui, mais je vais mieux. Avant, j’en voulais à la terre entière. Maintenant, j’espère relancer le processus pour avoir un bébé. Mais, sans se presser. Sans stresser… » dit-elle.

Elle est restée couchée dès la 3ème semaine de grossesse, à cause de menaces de fausse-couche. Elle a finalement accouché à terme mais ensuite, les complications se sont enchaînées après cette grossesse qui semble, selon elle, avoir augmenté les douleurs habituelles. Pourtant, elle estime avoir eu de la chance : le diagnostic d’endométriose a été posé très tôt dans son cas… ce qui est loin d’être une généralité.

Pourquoi le diagnostic est-il si difficile à poser ?

Le docteur Rakoto Nirhy-Lanto reconnaît bien volontiers que beaucoup de femmes qui souffrent d’endométriose ne sont pas dépistées suffisamment tôt.

« C’est un peu la faute à nous, médecins ! On ne pense pas toujours, en cas de douleurs pendant les règles, à cette maladie. Pourtant, on devrait avoir le réflexe de faire des examens. Une échographie, toute simple, suffit quelquefois à voir des lésions. Un scanner ou encore plus efficace une IRM et le diagnostic peut être posé ! » explique le médecin.

Le gynécologue insiste : « Oui, on doit y penser systématiquement et faire les examens. On voit des femmes qui souffrent, qui ne savent pas pourquoi… Quand elles connaissent le nom de leur maladie, c’est vraiment mieux pour elles ! » . Nommer, c’est déjà reconnaître qu’elles sont malades, qu’elles n’inventent pas.

Mieux former les médecins, faire reconnaître l’endométriose comme maladie longue durée

Elodie Delaune est responsable pour la Bourgogne-Franche-Comté de l’association nationale de patientes, agréée par le ministère de la Santé, Endomind.

Endomind travaille avec les malades et aussi les médecins et les autorités de santé. Dernière avancée obtenue par la présidente nationale après une entrevue avec Olivier Véran, ministre de la Santé : augmenter le nombre d’heures consacrées à l’endométriose au cours des études de médecine. Actuellement, y est consacrée… une heure, au cours des nombreuses années de cursus.

Cette association de patientes a créé également la première fondation de recherche sur l’endométriose, pour justement, mieux connaître cette maladie.

Autre cheval de bataille encore : faire reconnaître l’endométriose en ALD, Affection de Longue Durée, pour une meilleure prise en charge des malades.

L’endométriose : leur combat quotidien

L’endométriose handicape la vie de tous les jours. Outre les problèmes d’infertilité, c’est la fatigue permanente qui touche le plus le quotidien de ces femmes.

Blandine Béroud ne peut plus travailler à temps plein, mais à mi-temps. Elle a changé d’employeurs : ses parents lui ont confié le poste de vendeuse dans leur salle d’exposition de matériel de salles de bains.

De plus, elle exerce sur les réseaux sociaux un travail de marketing relationnel : elle y vend des cosmétiques et des compléments alimentaires. Un boulot qu’elle peut faire de son domicile et à son rythme. Avec ses comptes Instagram et Facebook, elle poursuit un objectif auprès des femmes malades : « Je veux leur redonner de l’espoir parce que vivre avec l’endométriose, c’est possible. Ce n’est pas facile tous les jours mais c’est possible ! »

Elle utilise les réseaux sociaux, et ses comptes sur Instagram et Facebook, pour « redonner de l’espoir » aux femmes qui ont cette maladie.

Angélique Masson a même fondé son association Endolive Fées pour partager son vécu.

Elodie Delaune, elle, a un parcours professionnel intéressant, grâce… à l’endométriose, même s'il commence par une décision déchirante : « J’étais danseuse professionnelle, classique et contemporaine, mais j’ai arrêté à cause de l’endométriose. C’était une période très difficile, j’étais très sportive. Puis, de ma maladie, j’ai fait une force. Je me suis orientée vers l’art thérapie. J’ai même ouvert un centre à Dijon qui a dû fermer à cause de l’épidémie. Je vais en ouvrir un à Besançon. Je veux aider les gens qui souffrent dans leur corps parce que je connais ces douleurs. Aider, c’est ma thérapie.»

Elle s’est engagée également auprès de cette association nationale, Endomind. Elle organise des groupes de parole mais aussi agit en créant des événements populaires (hors période Covid) pour mieux faire connaître cette maladie de la population et des milieux médicaux.

Elodie, comme Blandine, se veut porteuse d’un message d’espoir : « Oui, cette maladie a des répercussions sur sa vie sexuelle, sa vie de couple. Oui, sa féminité en prend un coup mais on peut travailler la relation entre le corps et l’esprit. On mène un combat avec son corps mais on peut créer des outils pour aller mieux. » Le dernier mot revient à Angélique Masson : « Je vis, je travaille, j’avance. Nous sommes toutes des combattantes. La bienveillance commence déjà avec soi-même. Il faut accepter cette maladie et s’aimer telles que nous sommes. »

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