Sophie Fontanel pose nue et reçoit des milliers de « Merci »

A l'occasion de son sortie de son livre sur le naturisme, Sophie Fontanel a accepté de poser une dans les pages du ELLE. Une série magnifique qui a suscité une vague d'enthousiasme alors que le corps des femmes est un sujet tabou après 50 ans.

« Ces photos sont incroyables et les mots qui les accompagnent mettent du baume au cœur des femmes », « On avance, c’est réjouissant », « Nue et approuvée », « Bravo ! », « Divine », « Quelle audace ! », et des « Merci » par centaines, par milliers. Ce flot de réactions enthousiastes donne la mesure du tsunami de bienveillance qui a submergé la journaliste et influenceuse Sophie Fontanel après qu’elle a posé nue dans nos pages en octobre. Une séance photo inédite pour accompagner la sortie de son nouveau livre « Capital de la douceur » (Editions Seghers) dans lequel elle raconte son expérience du naturisme sur l’île du Levant et la reconquête de sa nudité.

« On a le droit aussi d’être là, en majesté »

« J’ai reçu des milliers de commentaires et de messages privés, confirme Sophie Fontanel. De femmes qui me racontent à quel point ça leur fait du bien de me voir poser nue à mon âge. Il y a aussi beaucoup d'hommes. » Comme Stéphane qui lui écrit : « Tout doucement, une petite révolution s’amorce, le corps des femmes a le droit d’exister dans autre chose que l’habituel diktat. » Autant de réactions positives qui lui font oublier « le petit 3% de commentaires négatifs et très violents avec des émojis caca ou vomi me disant que je dégrade l'image de la femme », s’amuse la journaliste qui poursuit : « Je m’imaginais bien qu’il y en aurait des réactions mais l’onde de choc me confirme une intuition : une femme de 59 ans nue, complètement naturelle, qui pose avec fierté et aussi un brin d’humour, cela n’arrive jamais. On a honte de notre jeunesse qui décroît, et on rend nos corps invisibles. Et ça nous fait majoritairement du bien de voir qu’on a le droit aussi d’être là, en majesté, comme Harvey Keitel dans "La Leçon de piano". »

Pour Marie Charell, journaliste et autrice de « Qui a peur des vieilles ? » (Editions Les Pérégrines ), Sophie Fontanel « a ouvert la voie sur ce sujet du vieillissement des femmes. Elle montre que finalement ça peut être non seulement banal et bien vécu, mais même beau. » Déjà célèbre pour avoir fait de ses cheveux blancs une signature transgressive et féministe, elle n’est pas la première pourtant à évoquer cette invisibilisation des corps féminins âgés, ou tout simplement non conformes aux critères de beauté dont nous bombardent la société, la pop culture ou la mode.

Exclues du « marché de la bonne meuf »

Déjà Simone De Beauvoir abordait le sujet dans « La Vieillesse », un essai paru en 1970. Puis, en 1972, Susan Sontag pointait du doigt cette injustice dans un article intitulé « The Double Standard of Ageing ». Plus récemment, l’essayiste Mona Chollet décryptait dans son best-seller « Sorcières » la peur et la détestation que suscitent les femmes mûres et la façon dont elles sont mises au banc, exclues du « marché de la bonne meuf » comme l’écrit Virginie Despentes. « Le vocabulaire pour désigner les femmes âgées est toujours très péjoratif, poursuit Marie Charrel. Après la ménopause, c'est la double peine entre sexisme et âgisme car les hommes mûrs ne subissent pas le même traitement. » Il suffit de voir le tombereau d’insultes qu’a essuyé Corinne Masiero lorsqu’elle s’est déshabillée sur la scène des César. Une femme de plus de 50 ans qui se dévoile est aussitôt violemment sanctionnée. Cette terreur du vieillissement est d’ailleurs parfaitement intégrée par les femmes, et très tôt, au point qu’elles sont les principales consommatrices de chirurgie esthétique comme le montrait une étude commandée en 2019 par « Le Parisien » (les 18-34 ans font désormais plus de chirurgie que la tranche des 50-60 ans). « Nous n’avons pas de modèle positif de femmes âgées sur lesquelles se projeter, confirme Marie Charrel. Au cinéma, elles disparaissent de l’écran après 50 ans, ou sont entièrement refaites. » « Quand Yann Moix dit qu'il n’arrive pas à désirer une femme de mon âge, c'est que probablement, il n’en voit pas », analyse également Sophie Fontanel. Dernier exemple en date dénoncé par les réseaux sociaux : le film « Eiffel » mettant en scène Gustave Eiffel (Romain Duris, 47 ans) et son amour de jeunesse (Emma Mackey, 25 ans seulement).

Heureusement, dans la lignée du mouvement body positive, qui milite pour la représentation des corps non conformes aux stéréotypes en vogue (le plus souvent celui d’une jeune fille blanche et mince), de nombreuses femmes mûres s’assument sur les réseaux sociaux et même dans les campagnes de pub, comme Caroline Ida qui pose en sous-vêtements pour la campagne Darjeeling cet automne. Une image rare. Et politique. Un frémissement que confirme Marie Charrel : « Elles sont nombreuses à prendre la parole ou à écrire des livres sur la ménopause, le plaisir sexuel. Elles sont aussi plus expérimentées, plus libres, plus sereines et le revendiquent. Les lignes bougent. »

« C'est beau, la douceur d'un corps qui n'est plus vainqueur »

« Si on voit de plus de plus d’entre nous en débardeur avec nos bras ridés et qu’on nous trouve cool, on va tous s’habituer, renchérit Sophie Fontanel. Moi, je suis quelqu'un de mince, mais comme toute personne qui vieillit, il y a une pesanteur. Si je m'assois, ça s’étale ! J'ai toujours refusé cette histoire de fausse jeunesse, d’être très musclée, de faire du Botox. Je laisse bien sûr chacune faire comme elle veut, mais celles qui vieillissent bien ont justement fait la paix avec l'obligation d’être érotisées, d’être validées par un regard extérieur. C'est beau, la douceur qui se dégage d'un corps qui n'est plus vainqueur. »

Pourtant, pour Sophie Fontanel, cette séance photo a également des airs de victoire, de revanche prise sur un traumatisme passé : un viol à l’adolescence qui l’a, d’une certaine manière, mise à distance de sa propre chair. « La photo prise de dos m’a mise horriblement mal à l'aise parce qu’elle montre l'endroit où j'ai été blessée. Ça me violentait de l’exposer mais j'ai finalement accepté qu’elle passe en me disant que c'était justement le sujet. Une façon de me réapproprier ma nudité. D’ailleurs, les gens me remercient d'avoir eu le courage de dévoiler ma peau après ce qui m’est arrivée plus jeune. Ils ont compris, ils ont fait le lien. Parce qu'il faut être solide pour se montrer à nu. Ces réactions sont celles qui m’ont le plus bouleversée. » Et nous aussi.

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